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Les écrits de Paul
13 avril 2006

A mon frère par LA DIANE

AU PORT NORD OUEST le 29 vendémiaire an 11 (ou 12)

Le départ subit d'un bâtiment qui marche très bien ne me laisse que le temps de te dire que j'ai reçu par la FLORE commandant Boulet, tes deux malles en assez bon état.

Je t'écris avec détail sur leur contenu par un négociant de Nantes qui devrait partir dans trois jours.

Je t'engage, si surtout la guerre....à multiplier tes envois suivant mes demandes, ils ne pourront qu'être avantageux.

Dans les comestibles, le vin, la bougie (comestible les bougies ???) le beurre, les salaisons, l'huile, le savon présentent un beau bénéfice... Dans les marchandises sèches : les livres élémentaires comme les deux premiers de Besout, les grammaires, quelques mythologies, des géographies, des atlas, des cartes de France et des pays. Des globes petits et grands. De très grande mappemondes, quelques anglais (livre d') des Berquins, des Beaumont-Genlis (Stéphanie Félicité du Crest Comtesse de Genlis - 1746-1830 Femme de lettres romancière émigrée en 1792 édita les Contes moraux en 1802 - et le roman de la Duchesse de la Valière en 1804 ainsi que divers ouvrages historiques très prisés à l'époque) enfin tout ce qui a rapport à l'instruction et pour la lecture des enfants, également de la musique.

Des bretelles si elles sont encore de mode, des parapluies grands et moyens, des parasols, de la fayence (sic) anglaise en assiettes plates et petites et moyennes, quelques soupières, pots de chambre en fayence de France, des marmittes depuis et jusqu'à six pointes. Des verres à fond pour eau grands et moyens, des chapeaux légers, mais de bonne qualité et quelques uns pour enfants.

Autre lettre à son frère Jean Paul qui sera l'avant dernière du carnet - très longue, très détaillée sur la mode du XVIIIè siècle. Elle paraît être débutée le 28 vendémiaire et être écrite par Thérèse sous la dictée de Paul car l'écriture est celle de la jeune femme.

La dernière lettre s'adresse à Prudence le 7 ventôse an 12 - sans doute y a t'il eu un autre livret après celui-ci mais comment le savoir ?

A Jean Paul par la HENRIETTE le 28 vendémiaire an 11

J'ai reçu mon ami ta lettre de Paris du 10 août par le même navire qui m'a apporté la pacotille que tu m'y annonces.

Le tout est débarqué depuis trois jours en assez bon état et, en partie, déjà vendu.

Pour répondre d'abord à l'article de ta lettre où tu me dis qu'il faut convenir du mode de commerce que nous pouvons établir ensemble, celui qui me paraîtra le plus agréable avec toi serait celui ou tout serait commun entre nous : profits et pertes. Ainsi, puisque tu m'en laisses le choix, c'est celui que j'adopterais. Seulement, vu les considérations ue je t'ai détaillées dans ma lettre par La THEMIE de mars an 10, je désirerais que ma part d'intérêt ne fut pas plus de cinq à six mille livres comme tu le fixes toi-même.

Ainsi donc tu voudrais bien établir un compte à commerce de ton envoi d'Hambourg par Monsieur Goynard. Tu en fixerais l'époque que je ne connais pas au juste afin que je te tienne compte de ma moitié d'intérêt sur cette première somme. Quant à l'assurance je ne crois pas qu'il soit juste de t'en tenir compte puisqu'alors tu devrais compter à ton tour des 15,8% d'avaries qu'a éprouvé, à ce qu'il paraît, le vaisseau et qui ont été prélevées sur nos retours ce qui n'a pu être fait que d'après un jugement du tribunal de commerce.

Tu me débiterais également de la moitié de toutes les sommes que tu aurais pu avancer ainsi que de leur intérêt jusqu'à l'époque à laquelle je pourrais te rembourser, à me faire des envois le plus conformément à mes demandes qu'il sera possible jusqu'à la concurrence de la somme augmentée probablement de quelques bénéfices.

L'envoi de montres dans lequel tu as déjà un associé et la demande de marbrer pour mon usage que je t'ai faites ne seraient point compris dans notre société. A présent, je vais te donner avec détail mon avis sur ce que tu m'a envoyé :

Bijouterie de cuivre - je t'ai déjà dit mon avis sur cet objet, cependant depuis quelques temps, il s'en place un peu mais c'est en jolie bijouterie des formes les plus à la mode comme : médaillons, épingles etc.. j'ai cependant quelques espoirs de placer la tienne pour la traite. Elle est arrivée très ternie.

Eventails - Au prix où tu les as achetés on ne peut pas être embarrassés.

Souliers de femme - Cet article est presque toujours bon mais, il faut qu'ils soient généralement un peu grands de marocain ou masqué brodés pour la pluie. Pourtant si ce n'est pas beaucoup plus cher emballés avec le plus grand soin et fixer sur des trinquets avec des points ou dans des tiroirs de meubles, ce qui remplit les vides, doublés de toile parce que le cuir les fait piquer. Les tiens étaient dans le plus mauvais état, piqués et presque invendables, ils n'ont passé qu'à la faveur des bretelles.

Bretelles - Très bon article dans ce moment, j'eusse pu en vendre deux cent paires à un Piastre et demi aux madames.

Bougies phosphoriques - La colonie en est infectée, le bon achat nous sauvera

Porte-crayon à plume - étui d'écaille et ivoirs garnis - Bien choisis, bien achetés, on peut en envoyer un peu sans forcer sur cet article qui est toujours abondant, il ne faut point de porte-hameçon.

Montres - Détestable article en ce moment. L'île en regorge. Dans tous les cas, il ne faudrait jamais en envoyer de vieilles. On les a ici à bien meilleur marché qu'à Paris parce que l'or y est bien moins cher.

Etui de mathématique - assez bon article. Il en faut peu

Fiches - S'il n'y a pas d'erreur dans ton prix qui en porte vingt sept Piastres pour 3 Livres, on pourrait en envoyer beaucoup de toute grandeur jusqu'à 10 Livres. En fer et en cuivre ainsi que des serrures pour portes fortes et légères pour armoire. Je te l'avais déjà mandé.

Epingles - aiguilles - Il y en a toujours dans l'île les belles aiguilles anglaises se vendent encore moins. Il faut qu'elles ne soit nullement tâchées. Les tiennes étaient rouillées surtout celles en étui..

A NOTER QUE DANS LE LIVRET se trouve une aiguille à tête provenant sans doute de cet envoi

Bijouterie au poids - Il n'en faut point du tout et je pourrais t'en envoyer de retour si je ne l'employais. L'or au titre ne se vend ici qu'un Piastre et demi le gros et je fonds toujours de la bijouterie comme celle que tu m'as envoyée. Il ne faut dans ce genre que tout ce qu'il y a de plus beau et de plus nouveau.

Livres - Cet objet s'est encore trouvé bon parce qu'il était bien choisi et surtout bien acheté, surtout ceux que tu as eu en vente au prix chez Marandeau et sont malgré la réduction plus chers que les autres. Les livres élémentaires sont toujours bons, cependant il ne faut en mathématiques que les deux premiers volumes de Bezost et, surtout, le premier, j'eusse pu en vendre cent volumes mais il ne faudrait pas en envoyer cette quantité parce qu'ils peuvent devenir plus communs.

Des grammaires, des géographies avec de beaux Atlas, de grandes cartes de France et mappemondes. Quelques globes colors et terrestres. Quelques mythologies. Quelques dictionnaires tant français comme ceux que tu m'as envoyés, qu'anglais. Tu m'en annonces de portatifs (effectivement à cette époque les dictionnaires sont volumineux et intransportables s'agirait-il d'une édition beaucoup plus allégée ?) qui eussent été bons mais je n'ai pas trouvé encore les Berquin. Mme Beaumont-Genlis et tout ce qui a rapport à l'instruction et à la lecture des enfants. Il faut que tes livres élémentaires soient des dernières et meilleures éditions et cartonnées.

1

Extrait de cette fameuse lettre....

Le 5 ventôse (même lettre)

Je t'ai écrit à la hâte il y a six jours et je t'indiquais en abrégé les mêmes objets que dans celle-ci. Les comestibles continueront toujours d'être l'objet d'envoi le plus sur, en les prenant chacun dans leurs lieux : le vin, la bougie, le beurre, la salaison, l'huile, le savon, le vin en barrique entraîne cependant de grands frais et demandent à être choisis avec beaucoup de soin.

Celui en caisse serait plus convenable parce que d'ailleurs il peut supporter l'attente si le moment ne se trouve pas assez favorable pour la vente, le beurre, salaisons et bougies peuvent être envoyés avec avantage de Bretagne mais il faut que l'huile et le savon viennent de Marseille même.

Je ne sais ou on tire les marmites celles de une à six piastres sont d'une consommation journalière si grande qu'on peut toujours compter sur un bénéfice. La fayence anglaise c'est à dire des assiettes plates et un tiers creuses, plats petits et moyens également sont bonnes. Quelques soupières pour autre chose. Des pots de chambre mais en fayence de Rouen ou autre de même espèce. On peut remplir les vides de bouchons ou autres choses légères. Des verres à boire dits fonds-d'eau grands et moyens. Des chapeaux frais et légers, quelques uns pour enfants - des parapluies grands et moyens. Quelques parasols. Des bretelles si elles sont encore de mode.

Continuation de mes remarques sur ton envoi :

Dessins et crayons - Tu as trop forcé sur cet article, il n'en faut plus.

Musique - Il y en avait beaucoup plus que je n'en avais demandé et beaucoup trop.

Gardes toi d'en envoyer d'autres. Un des frères Gaveaux (Pierre GAVEAUX né en 1761 à  Béziers, chanteur, compositeur. Egalement en 1847 un autre GAVEAU prénommé Joseph fondera une maison française de facture de piano qui fabriquera également des clavecins, des clavicordes, épinettes et virginals) en a apporté pour trente mille. Envoyez seulement quelques solfèges.

Tu pourrais encore envoyer quelques jolis fusils d'enfants - peu - à deux coups. Quelques glaces dans la proportion que je t'ai demandé. Quelques jolis meubles mais pas par de la Hogue et peu de placage. Tes pendules vases se fussent placées si elles avaient été très fraîches (neuves sans doute).

Je ne puis pas commencer à te faire des retours avant deux ou trois mois ne pouvant vendre à plus court terme. J'en donnerais avis d'avance à un de nos correspondants pour faire commettre l'assurance.

L'ivoire et l'écaille sont rares, cependant je verrais. Il me semble que tu pourrais vendre une partie de nos retours à Paris même et par là nous sauver une garantie considérable.

Continue de faire pour le mieux de nos affaires et si tu trouvais à me faire faire des envois pour d'autres je me recommanderais de toi. La commission ordinaire du pays est de 5% sur les ventes et 5% sur les retours. Je me contenterais de 3% sur les retours. J'en recevrais également à un demi pour bénéfice en bons objets à un prix raisonnable.

Adieu mon ami.

PS Monsieur le Gendre a du te faire part des retours que je lui ai adressés par MM. Gautier Négociants à Bordeaux pour partie de la vente de votre envoi de montres. J'ai été obligé de vendre la dernière à terme et je n'ai pas encore été payé. Je ne suis pas sans inquiétude sur cette créance qui est de 50 Piastres. Je vais encore faire mon possible pour en presser le payement et joindre cet objet à ceux qui nous concernent.

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